Supermarchés : une nouvelle loi pourrait faire flamber les prix alimentaires

Depuis quelque temps, les patrons des chaînes de supermarchés fustigent le projet de loi Descrozaille. On vous explique tout.

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Ces derniers temps, les Français ont dû faire face à de nombreuses difficultés. Après une longue crise sanitaire, les tarifs de l’énergie ont connu une flambée. D’ailleurs, les prix des matières premières et des produits ont augmenté dans de nombreux secteurs. Pour les ménages, faire ses courses dans les supermarchés devient de plus en plus compliqué. En effet, si le ticket de caisse flambe, il ne s’agit pas du seul problème. Dans la grande distribution, l’inflation a durci les négociations entre les chaînes de magasins et les industriels. En cause ? Des coûts de productions qui explosent et poussent les fabricants élever les tarifs leurs marchandises. Pour résoudre le problème, le député Frédéric Descrozaille a donc proposé un texte, qui indignent les géants des supermarchés. Et qui pourrait bien alourdir encore les dépenses des Français.

Les supermarchés face à la crise

Ces dernières années, les centrales d’achats des enseignes de grande distribution avaient pris l’avantage dans la négociation face aux industriels. Leur objectif ? Négocier l’achat de stock à des prix toujours plus compétitifs. Ainsi, des chaînes comme Auchan ou Leclerc pouvaient maximiser leurs marges. Et, dans une certaine mesure, conserver des tarifs attractifs pour les consommateurs.

Dans cette guerre commerciale sans merci, des supermarchés concurrents ont décidé de s’allier pour peser plus lourd. Ainsi, en novembre 2020, Que Choisir révélait l’existence de grosses centrales d’achats, regroupant plusieurs enseignes.

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 » L’une de ces centrales d’achat, Horizon, créée en 2018, regroupe Auchan, Casino, Metro et Schiever. Elle pèse plus de 20 % du marché de la grande distribution (2). Un tel mastodonte ne pouvait laisser l’Autorité de la concurrence (l’administration chargée de veiller au bon fonctionnement du marché et de lutter contre les pratiques anticoncurrentielles) indifférente. »

Ainsi, ces derniers mois, plusieurs fournisseurs et industriels ont pris la parole sous couvert d’anonymat pour dénoncer cette situation. D’après eux, les centrales d’achats des supermarchés utilisent leur pouvoir pour demander des conditions de vente intenables. Résultat ? Des négociations parfois musclées, voire franchement agressives.

« Oui, une négociation, même si cela se passe dans une salle de réunion ordinaire et plus dans un box de quelques mètres carrés, c’est nerveusement épuisant, cela peut être humiliant. »

Devant ces agissements plutôt discutables, les pouvoirs publics ont décidé de prendre la main pour encadrer le secteur de la distribution. D’autant que les supermarchés ont connu des ruptures de stocks sur plusieurs produits cette année.

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Les consommateurs face à des pénuries temporaires ?

Cet été, les clients des supermarchés ont eu la mauvaise surprise de constater que la moutarde avait déserté les rayons. Pourtant, cette pénurie n’avait rien à voir avec l’inflation. Et encore moins avec la crise ukrainienne. Il s’agissait simplement d’une mauvaise récolte survenue en 2021 au Canada. En effet, ce pays assure l’essentiel de la culture des grains de moutarde.

Néanmoins, les experts de la grande distribution ont pu observer une hausse des ruptures de stocks sur plusieurs produits tels que le riz, l’huile, le blé, ou encore le beurre. En effet, le taux de rupture moyen a pu passer de 4,1 % en 2021 à 5,6 % en 2022.

Or, depuis quelques semaines, les tarifs de l’énergie ont explosé. Résultat ? Les coûts de production ont explosé pour les industriels. Face à ces factures d’électricité en hausse, ils souhaitent donc augmenter leurs prix de vente aux supermarchés. Mais d’autres ont même dû réduire leur activité, à l’instar du Groupe Cofigeo (qui détient Panzani et William Saurin).

Dans ce contexte, certains craignent que les négociations commerciales entre fournisseurs et supermarchés ne dégénèrent. Ainsi, plusieurs députés Renaissance ont déposé un projet de loi, pour garantir l’approvisionnement, et limiter les ruptures de stocks. Cette proposition porté par Frédric Decroizaille intervient dans un contexte économique plutôt agité.

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 » La crise déclenchée par le conflit en Ukraine, aggravant considérablement la hausse des prix de l’énergie, des transports et des emballages, a conduit les acteurs à signer, sous l’égide des Ministres concernés, une charte d’engagements. Elle dresse un cadre de renégociation des prix de cession des produits alimentaires afin de garantir une juste rémunération et la pérennité des divers maillons de la chaîne. »

Les enseignes de supermarchés critiquent vivement cette proposition

Pour l’heure, lorsque les distributeurs et les fournisseurs ne trouvent pas d’accord, ils conservent les tarifs négociés durant l’année précédente. Et ce, le temps de réussir à trouver un accord commercial. Mais en raison de l’inflation galopante qui sévit depuis des mois, plusieurs industriels et producteurs ne peuvent plus tenir dans ces conditions. C’est en tout cas la position du Président de Haribo France et de l’Ania qui connaît bien ce bras de fer avec les supermarchés.

 » En cas de désaccord, on est obligé de pratiquer les anciens prix, mais avec 10% d’inflation, vous comprenez bien que c’est impossible. Il faut faire en sorte d’aller au bout des négociations. Mais si dans un cas de figure, vous avez un industriel qui dit « à ces conditions-là, je ne peux pas », on prend le temps. On discute ensemble, on va peut-être voir le Médiateur et dans un nombre infinitésimal de cas, si je dois rompre, je peux rompre. »

Mais les patrons de la grande distribution, eux, grincent des dents. Michel Biero, le dirigeant des supermarchés Lidl en France, n’a pas hésité à exprimer son désaccord sur RMC :

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 » C’est le pire moment. C’est une loi pro-inflation, ça va exploser. Ce n’est pas moi qui le dis. Le patron des TPE, PME et ETI a dit que ça allait entrainer des hausses de 30 à 50% sur les étiquettes dans les rayons. C’est une catastrophe pour les Français. C’est une loi pro-inflation, pro-multinationales, mais surtout pas pour le consommateur. »

Les dirigeants des grandes surfaces prédisent une forte hausse des prix en magasins

Quelques heures plus tard, le président du groupe Intermarché, Didier Duhaupand a, lui aussi, pris la parole sur BFM Business. En effet, il s’insurge contre l’article 3 du projet de loi Descrozailles. Ce dernier prévoit qu’en cas de litige avec les supermarchés, le prix retenu par le producteur sera le seul valable.

 » C’est un scandale absolu qui est en train de se passer. Cette proposition de loi est une folie pour les consommateurs. Dans tout match, il y a deux équipes et un arbitre qui décide des règles. C’est la première fois qu’on laisse une équipe écrire elle-même les règles. »

De son côté, l’avocat Boris Ruy, spécialisé en droit de la concurrence, partage à peu près la même analyse.

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 » Ce n’est pas réaliste de répercuter toutes les hausses, les négociations, c’est aussi ce qui va amortir l’inflation. Le gouvernement ne le dit pas, mais il compte beaucoup sur les distributeurs. »

Espérons que les clients ne subiront pas trop les conséquences de cette bataille des prix. En effet, cela fait déjà plusieurs mois que le pouvoir d’achat des Français baisse. Qu’il s’agisse d’acheter en supermarchés, de se chauffer, ou même de payer sa consommation d’eau.

Sources : latribune.fr

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